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Whitney Plantation Wallace, Louisiana, États-Unis

La Louisiane: une ancienne colonie française

L’histoire de la Louisiane française commence à la fin du 17e siècle lorsque Pierre le Moyne Sieur d’Iberville établit sur le rivage du golfe du Mexique la colonie de Biloxi en mai 1699. Le développement de la colonie était très lent car les colons étaient d’emblée décimés par les rigueurs de la traversée de l’Atlantique. Les survivants devaient faire face à des maladies qu’ils ignoraient comme la fièvre jaune, à la faim et aux attaques des autochtones. A partir de 1717, le roi de France avait pensé trouver en la Compagnie d’Occident de John Law, l’instrument de la mise en valeur véritable de la colonie. En attendant l’arrivée des premières cargaisons humaines des côtes africaines, la Compagnie trouvait très peu de volontaires pour la lointaine Louisiane. On dut alors recourir à ce qu’il convient d’appeler une colonisation pénale.

Dès 1717, avait été émise l’idée de la déportation en Amérique des faux sauniers, des fraudeurs de tabac (le sel et le tabac étaient des monopoles royaux), des vagabonds, des soldats déserteurs, de jeunes gens de toutes conditions sociales, et même des prostituées. Cette politique avait créé beaucoup plus de problèmes qu’elle n’en avait résolus. De nombreux abus avait été commis. Les échauffourées s’étaient multipliées entre la population et la police de même que les mutineries dans les prisons.

La réputation de la Louisiane étant compromise, John Law prit lui-même une concession en Louisiane pour laquelle il fit recruter, avec force publicité, des milliers de laboureurs et artisans allemands. Une grande partie de ce groupe fut installée en amont de la Nouvelle Orléans sur les rives du Mississippi. Leurs établissements, encore désignés aujourd’hui sous le nom Côte des Allemands (German Coast), englobent les paroisses Saint-Jean Baptiste et Saint Charles, et une partie de la paroisse Saint-Jacques où commence la Côte des Acadiens (Cajun).

La Compagnie d’Occident, devenue Compagnie Perpétuelle des Indes à partir de mai 1719, avait dévolu une attention particulière à la mise en valeur de la colonie avec des esclaves tirés principalement de la côte africaine la plus proche, c’est-à-dire le Sénégal. La guerre de Sept ans (1756-1763) se traduisit par le passage de la colonie des Français à leurs alliés espagnols. Des importations massives d’esclaves furent opérées à partir des côtes africaines, en Sénégambie, dans les golfes du Benin et du Biafra, en Afrique centrale et même dans le sud-est du continent. La population servile avait davantage augmenté pendant la période américaine (à partir de 1803) malgré l’interdiction, à partir de janvier 1808, de l’importation d’esclaves dans le territoire américain.

Whitney Plantation, une plantation de la Côte des Allemands

Whitney Plantation, est située dans la paroisse St. Jean Baptiste, sur la fameuse River Road, route qui longe le fleuve Mississippi, entre New Orleans et Baton Rouge, constituant ainsi un trait d’union entre les plantations les plus prospères et les plus célèbres de l’Etat de Louisiane avant la Guerre civile. La plantation a été fondée par Ambroise Heidel, l’ancêtre de tous les Haydel de Louisiane. Il était arrivé dans la colonie le 1er mars 1721 à bord du navire Les Deux Frères. Il était accompagné de son frère Mathieu et de ses sœurs Barbe et Cathérine. Ils étaient parmi les 40 survivants sur 200 passagers embarqués plus trois mois auparavant à Lorient, le port de la Compagnie des Indes.

Ambroise vit le jour en novembre 1702 à Neunkirchen, près de Miltenberg, dans le diocèse catholique de Wurzburg. Il était le fils de Johann Adam Heidel et d’Eva Schonberg. Le père mourrut à Lorient avant l’embarquement et la mère peu de temps après son arrivée dans la colonie. En 1724, le premier recensement de la Cote des Allemands mentionne Ambroise dans une ferme de six arpents de face sur une profondeur de 40 arpents avec un unique porc comme tout cheptel. A sa mort, peu avant 1770, il possédait une ferme de 11,5 arpents et 20 esclaves. Il s’était enrichi avec la culture de l’indigo. A la fin du 18e siècle, et suite à des agrandissements successifs, la plantation, alors appelée Habitation Haydel, était sous le contrôle de Jean Jacques Haydel, le cadet des enfants d’Ambroise.

En 1820, sous le poids de l’âge, Jean Jacques Père céda la plantation à ses enfants, Marcellin et Jean Jacques Fils. En 1840, après la mort prématurée de Marcellin Haydel, la plantation fut vendue à sa veuve, Marie Azélie Haydel. A la mort de cette dernière en 1860, la plantation était devenue un des fleurons de l’économie sucrière du sud des Etats-Unis d’Amérique. Habitation Haydel devient Whitney Plantation en 1867 par la volonté du nouveau propriétaire, l’homme d’affaires Bradish Johnson qui tenait à honorer son petit fils Harry Whitney, écrivain et explorateur de l’Arctique.

Le travail de mémoire à Whitney Plantation

Le Whitney Plantation Museum est un lieu de mémoire conçu pour honorer la mémoire des êtres humains qui ont vécu comme esclaves sur la plantation, dans le reste de la Louisiane, et partout ailleurs dans le Sud des USA. La démarche est en totale rupture avec l’approche des plantations-musées qui mettent l’accent sur la splendeur et le luxe qui était le quotidien des maîtres. L’esclavage est présenté sous ses différentes facettes à travers les témoignages d’enfants qui ont vécu dans leur chair les affres de cette institution. Cette stratégie de communications est dictée par le fait que les enfants sont des êtres innocents et raconter l’expérience de l’esclavage a travers leur regard permet d’imprimer plus facilement une certaine prise de conscience chez les visiteurs de tous âges. Une exposition permanente bien illustrée retrace la vie de des esclaves du lever au coucher du soleil et de la naissance a la mort.

La documentation est tirée d’interviews d’anciens esclaves menées dans les années 1930, en pleine crise économique, par la Work Progress Administration dans le cadre du Federal Writers’ Project avec l’appui de la Bibliothèque du Congrès. Ces anciens esclaves étaient nés dans les années 1850 pour la plupart d’entre eux et la mémoire de l’esclavage qu’ils portaient encore en eux était celle de leur enfance. La mémorialisation de l’espace s’appuie aussi sur de nombreuses sculptures d’enfants appelés «the children of Whitney» dont le réalisme est saisissant. Elles sont l’œuvre de Woodrow Nash, un artiste afro-américain résidant de l’Etat d’Ohio.


Écouter une émission de la Radio France Internationale sur «Saint-Louis du Sénégal et de la Nouvelle-Orléans, Etats-Unis: Deux Villes Mirror», à la Nouvelle-Orléans, Louisiane de 22 au 25 avril 2013.


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